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Patrimoine de la commune de Lama

L’église romane de San Lurenzu et ses fresques

L’église San Lurenzu de Lama, blottie dans la campagne au pied du village perché sur son éperon, a été construite entre le cœur du XIIe et la fin du XIIIe siècle dans la zone alluviale cultivable, en contrebas, assez proche de la rivière Ostriconi. Toujours en élévation, elle est bâtie selon un plan rectangulaire à vaisseau unique, deux fois plus longue que large et se termine par un chœur à chevet plat surélevé. Le plan et les volumes sont d’une extrême simplicité et dans la tradition préromane. La voûte qui couvre le chœur est ornée de décors peints, dans une veine populaire tout imprégnée de tradition paysanne. Deux armoires ou placards liturgiques, sont situés près du sol, juste en dessous des fresques. L’église possédait à l’origine une entrée à l’ouest, aujourd’hui condamnée par une installation agricole, ainsi qu’une porte latérale dans le mur gouttereau sud.

Les fresques sont disposées sur la voûte de l’abside, centrées par un Christ en majesté dont on distingue encore les doigts de la main droite (les trois premiers doigts tendus à la verticale comme il convient), les doigts du pied droit, un livre posé sur le genou avec une inscription, et enfin des morceaux de la frise de la mandorle, dessinée sur la partie haute centrale de l’arc. On devine la jambe droite, le genou, la main droite. On bute sur la lecture du livre tenu par le Christ, les lettres qui apparaissent ne renvoyant à rien de connu.

Le Tétramorphe, les quatre évangélistes, sont ici, comme le plus souvent, représentés autour du Christ, à l’extérieur de la mandorle. L’inscription S. Marc, désigne sans conteste en dessous d’elle saint Marc avec le lion ailé dont on distingue les griffes ; on devine aussi le livre sur lequel elles devraient reposer. À ses côtés, comme c’est l’habitude, saint Luc, représenté par le taureau ailé dont on distingue les cornes. De l’autre côté, saint Mathieu est représenté par un homme avec ses ailes, dont on devrait voir un livre à la main gauche. On ne devine plus aujourd’hui les serres de l’aigle de saint Jean.

Les retombées de la voûte de l’abside portent ensuite l’image de deux saints, d’un dessin très semblable. On ne sait pour l’instant quelle identité attribuer au saint représenté du côté de l’épître. En revanche, du côté de l’Évangile, l’attribution à saint Laurent ne semble faire aucun doute. On reconnaît en effet sous son bras gauche l’instrument de son supplice, le gril sur lequel il fut tourmenté. On voit encore, près des doigts de la main gauche, un fragment d’inscription.

À l’origine, le bâtiment était probablement couvert d’une simple charpente apparente, remplacée ensuite par une structure voûtée, en partie réceptionnées par l’ajout de deux contreforts. C’est sans doute lors du voûtement que quatre pilastres intérieurs ont été construits en soutien de voûte sur le mur nord. Les angles de l’église ont également été renforcés par des contreforts subcirculaires, probablement à cette même occasion. Cette forme est reprise dans les courbes de l’abside à chevet plat.

L’église a perdu peu à peu sa fonction paroissiale avec la construction dans la seconde moitié du XVIème siècle de l'église actuelle dans le village même. Au XVIIème siècle, on y ensevelissait encore les morts. Au XVIIIème siècle, on s'y rendait seulement en procession le Vendredi Saint et le jour de la Saint Laurent. Vendue en 1798 comme bien national, elle sera transformée en exploitation oléicole, avec en particulier la mise en place d’un pressoir dont il ne reste que les aménagements en bois dans le mur ouest pour un pressoir à arbre et la maçonnerie qui recevait les éléments de la presse comme le bucatoghju sur lequel était placé les zimbine ou scourtins. Le bâtiment sera converti en habitation sans trop d’altération dans le courant du XXe siècle. Classée monument historique en 1995, l’église est rachetée par la commune en 2005 et est actuellement en cours de restauration.

Pour en savoir plus

Patrick Ferreira et Antoine Franzini, « L’église San Lurenzu de Lama dans la vallée de l’Ostriconi. Une longue occupation, du religieux à l’agricole », dans Six millénaires en Balagne, H. Paolini-Saez et É. Pereira (dir.), Actes du IIIe colloque du Laboratoire régional d’archéologie, Belgodere, 14-16 octobre 2016, Cahiers Corsica, 281-301, 2021, p. 128-135. Télécharger

Église de San Lurenzu et Notre Dame de la Visitation

Construite aux abords du village dans la seconde moitié du XVIème siècle sous le titre de Notre-Dame des Grâces, cette église subit une véritable refonte dans les années 1639-1644 et prend alors le titre de Notre-Dame de la Visitation. C’est également à cette époque que l’on doit l’arrivée du beau meuble de sacristie, dont la facture XVIIe de la façade de noyer semble s’imposer (la partie supérieure du meuble étant en revanche clairement attribuable au XIXe siècle). Elle y ajoutera ensuite le titre de San Lurenzu qui était attaché à l’ancienne église, située dans la vallée en contrebas du village, abandonnée à la fin du XVIIIe siècle. Leurs biens seront finalement réunis en 1786. Avec la Révolution française, le gouvernement décide dans les premiers mois de 1800 d’abandonner aux communes les édifices destinés à l’origine à l’exercice du culte.

À la fin du XIXe siècle, un agrandissement a consisté d’une part dans la construction du clocher. Il a consisté d’autre part dans l’allongement et l’élargissement du fond de l’église. On a détruit la façade ancienne et agrandi les deux derniers arcs latéraux. Outre le gain de place dans les trois nefs, l’espace ainsi ouvert sur les côtés a permis, à droite en entrant, la construction de la chapelle du Saint Rosaire et à gauche en entrant, l’agrandissement de la chapelle des Âmes du Purgatoire, qui existait cependant déjà.

Le début des années 1950 inaugure une nouvelle époque de transformations. C’est d’abord un nouveau carrelage puis surtout, dans les années 1960, dans le contexte de Vatican II, la démolition de l’autel baroque et de l’autel de Saint-Antoine de Padoue, l’enlèvement de la balustrade, de nombreuses statues et de leurs socles, de la chaire à prêcher, des lustres à pendeloques pourtant électrifiés. Enfin, en 1992-1993, la voûte de l’église a subi une totale réfection par un ancien légionnaire devenu artiste fresquiste.

L'intérieur a la forme d'une basilique avec trois petites nefs toutes maçonnées avec des voûtes plein cintre : celle de la nef centrale est beaucoup plus haute et imposante que les deux latérales beaucoup plus basses et en angles. Elles communiquent avec la nef centrale par trois arcs auxquels correspond respectivement une chapelle.

Le tableau placé actuellement au-dessus du maître autel a été peint en 1840 par Anton Santo Benigni, comme la signature en témoigne. C’est sans doute aussi la date de son installation à cet endroit. Saint Laurent, qui en est le sujet, est, aussi loin que l’on remonte dans le temps, le titre du bénéfice ecclésiastique attaché au village de Lama. C’est à la charnière du XVIIIe et du XIXe siècle que le peintre d’origine toscane, mais installé et marié dans l’île, Francesco Carli, pourrait avoir réalisé le petit tableau avec cadre en bois ayant pour thème la Visitation, la rencontre de sainte Elisabeth et de la Vierge.

L’autel consacré à saint Philippe de Neri (dans une niche vitrée au-dessus de l'autel se trouve un buste reliquaire du saint en bois polychrome) appartient (selon Caroline Paoli) au barochetto, un style qui continue de s’imposer en Corse à la fin du XVIIIe et jusqu’au tout début du XIXe siècle, autrement dit entre 1780 et 1820, alors que la tendance architecturale européenne est maintenant passée au néoclassicisme.

La chapelle de la Nativité de saint Jean Baptiste ne contient plus d’autel aujourd’hui. Un tableau sur toile représentant Saint Jean-Baptiste, encadré dans le mur même, est attribué à Luigi Brunetti qui l’aurait peint entre 1843 et 1851.

L’autel à droite en entrant ne fut élevé qu’après 1891, pour servir à la compagnie des femmes du Très Saint Rosaire, et on ne sait à quelle date l’autel situé à gauche en entrant, voué aux Âmes du Purgatoire, fut finalement détruit. Cette chapelle des Âmes du Purgatoire n’est plus représentée actuellement que par un tableau installé dans un encadrement découpé dans le mur. Ce tableau appartient à la collection rassemblée par le cardinal Fesch, en partie dispersée dans les églises des villages de Corse au XIXe siècle. La trame de la toile, grossière, permet d’évoquer avec prudence une peinture du XVIIe siècle. Michel-Édouard Nigaglioni a fait remarquer que le thème de cette œuvre n’appartient pas aux thèmes des tableaux d’église, mais plutôt à la commande privée d’un sujet biblique, ce qui va bien dans le contexte des tableaux appartenant à la collection Fesch.

Pour en savoir plus

Antoine Franzini, L’église Notre-Dame de la Visitation et Saint-Laurent, paroissiale de Lama. L’autel majeur et les arche, les chapelles particulières et les autels servis par les confréries, 2015. Télécharger

Le Stallò

Construite au XIXème siècle par les Bertola, une famille de propriétaires terriens, comme l'ensemble de la bâtisse, cette vaste salle aux allures d'église accueillit pendant longtemps les écuries de la maréchaussée. Une rangée centrale de piliers en pierres divise la salle en deux allées et le plafond en deux rangs de voûtes d'arête de facture assez grossière. Des œils de bœuf apportent un peu plus de luminosité. Acquis par la commune en 1985, le Stallò abrite aujourd'hui une exposition permanente de vieilles photographies offertes par les familles du village, représentant des personnages ou des scènes traditionnelles d'autrefois. Cette exposition constitue à la fois une mémoire du village et un hommage aux anciens.

Casa Bertola

Maison bâtie à partir de 1625 par le prêtre Giacomantonio Bartoli, agrandie en 1660 par son neveu le prêtre Antonbattista Bartoli, et à nouveau au cours des siècles suivants. Elle est finalement ornée vers 1850 d’un belvédère et de peintures plafonnantes exécutées par le peintre livournais Luigi Tuticci dans les pièces de réception, représentant en particulier les quatre grands poètes italiens de la Renaissance (Dante, Pétrarque, Le Tasse et L’Arioste). Ces ornements, ainsi que la richesse décorative (moulures, corniches, colonnettes plaquées, motifs en feuille d'acanthe aux quatre coins et frise de grecques), sont caractéristiques de certaines maisons de notables ruraux au milieu du XIXe siècle.

Casa Saturnini

Maison bâtie à partir de mars 1791 et en 1792 par le maître maçon lombard Giacomo Buzzi pour Pierre Saturnini, médecin à Lama. On connaît le nom de trois des maçons, le Bastiais Giovanni Giacomo Rasò, le Génois Giovanni Battista Profumo et le Piémontais Bartolomeo Molinari di Alessandria della Paglia, qui habitent tous trois Terra Vecchia de Bastia. Devenu en 1796 médecin des hôpitaux militaires en Corse, Pierre Saturnini suit la Grande Armée dans la campagne de Russie où il trouve la mort en 1812 à la bataille de la Berezina. On remarquera le porche qui répond à l’inspiration de l’époque, et les cheminées originales dont le style reste indéterminé.

Pour en savoir plus

Antoine Franzini, Haine et politique en Corse. L’affrontement de deux hommes au temps de la Révolution française. 1780-1800, Ajaccio, Éditions Alain Piazzola, 2013, 391 pages.

Casa Ceccaldi

Maison bâtie entre XVIIe et XVIIIe siècle, augmentée d’un étage, ornée d’arcades et de peintures plafonnantes en 1858. Ces ornements, comme la cour fermée, sont caractéristiques de certaines maisons de notables ruraux au milieu du XIXe siècle.

Casa Santini

Le docteur en médecine Antonio Santini (1704-1776) avait épousé la nièce de Giulio Matteo Natali d’Oletta, l’auteur du Disinganno (1736), le premier texte théorique des révolutions de Corse. Une biographie de son frère cadet, le jésuite et poète don Carlo Santini (1708-1761), était éditée à Rome dès 1772. Ce contexte intellectuel trouvait un débouché inattendu dans la personnalité attachante du petit-fils d’Antonio, Jean-Noël Santini (1790-1862). Modeste soldat de l’Empire, il devient le fidèle gardien du portefeuille de l’empereur à Sainte-Hélène. Il sera nommé en 1853 gardien du tombeau de Napoléon aux Invalides.

Casa Monti

La casa Monti est un bel exemple d’architecture villageoise conservée dans son ancien état, peu modifiée au XIXe siècle, dans un contexte de petite notabilité rurale. Né en 1739, Gian Stefano Monti, curé de Lama puis vicaire épiscopal, devient en mai 1793 le très républicain président de l’administration provisoire du département de la Corse, repliée à Bastia. Réfugié à Toulon en mai 1794 après la prise de la ville par les troupes anglo-corses, il y décède en juin 1795.

Pour en savoir plus

Antoine Franzini, Haine et politique en Corse. L’affrontement de deux hommes au temps de la Révolution française. 1780-1800, Ajaccio, Éditions Alain Piazzola, 2013, 391 pages.

A torra – Casa Lellè Massiani

L’ancienne tour défensive du village, a torra, dont il ne reste aujourd’hui que le premier élan, s’est effondrée vers 1950. La maison qui lui fait face est un exemple de ces demeures de notables ruraux, exploitant essentiellement l’oliveraie de la vallée. On remarquera le porche qui répond à l’inspiration du début du XIXe siècle. La date de 1680 inscrite tardivement à l’imposte de la porte d’entrée fait mémoire de l’ancienneté de cette maison familiale, agrandie progressivement au cours des siècles et occupée aux XVIIe et XVIIIe siècles par une lignée de notaires villageois.

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Les caves à fromage de l’ancienne maison Corallini

Les caves à fromage de l’ancienne maison Corallini forment « un ensemble de trois caves voûtées s'enfonçant dans des grottes naturelles baignées par des vasques d'eau claire et constituant ainsi des sortes de nymphées. Cet ensemble est relié par des escaliers de pierres à des terrasses supérieures. Devant ces grottes, une placette soutenue par un mur en pierres apparentes constitue un belvédère agréable depuis lequel on bénéficie d'une vue sur le rivage de l'Ostriconi au loin et sur une colline très proche sculptée par des jardins en terrasses bordés d'innombrables murs de pierres formant ainsi un très beau paysage minéral, élément important de la mémoire et du patrimoine du village" (J. Poncin, 1993).

Le castellu di Mont’a Porretu

Situé deux crêtes au sud du village de Lama, construit entre XIIe et XIVe siècle, cette forteresse miniature est établie sur des surfaces exiguës. On y retrouve comme dans beaucoup de fortifications insulaires la construction soignée de la tour quadrangulaire dans la partie sommitale du périmètre fortifié, la citerne à l’autre extrémité, revêtue de son enduite de chaux et tuileau, pouvant contenir 6000 litres d’eau, et le granit entaillé pour la pose de poutres ou de gonds. La fouille menée en 1991 a permis de mettre en évidence un logis central entre le tour et la citerne. L’étude du mobilier osseux (effectuée par Jean-Denis Vigne) a montré que moutons et chèvres forment la majeure partie des restes osseux (52 %), devant le bœuf (39%) et le porc (8 %). La chasse complète modestement cet échantillon avec les restes d’un mouflon, d’un cerf et d’un sanglier.

Pour en savoir plus

Antoine Franzini, Lama dans l'Ostriconi. Pouvoirs et terroirs en Corse au Moyen Âge, Gênes, SAGEP, 1992, 84 pages.

Le village abandonné du Loro

Construit au pied du castellu di Mont’a Porretu, lo Loro apparaît dans les textes en 1206, comme l’habitat de Lama. Il est abandonné dans le cours du XVIe siècle, mais contient au milieu du XVe siècle autant d’habitants que Lama, deux fois moins au début du XVIe siècle. C’est aujourd’hui un ensemble de maisons ruinées, disposées en quinconce, où l’on distingue facilement la maison supérieure de construction tardive.

Lama Secretu

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Lama se raconte, acteur et lieu en même temps. Il nous dévoile son (ses) histoire(s) au long d’une balade en 5 actes, passant par 23 points.
Cette scène de cinéma, posée à 500 m d’altitude, dévoile alors ses personnages, ses quartiers, sa nature, avec un parallèle permanent entre son histoire et son festival de cinéma.

Là, dans ces lieux de spectacle et coulisses, se mêlent alors l’histoire du village, de ses personnages, historiques ou plus anonymes.

Parmi ceux-ci, deux plus particuliers apparaissent : Stefano Monti et Fabiano Bertola, et chaque point du parcours suit leur correspondance célèbre dans laquelle ils se déchirèrent à la fin du XVIII° siècle.

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Le cheminement dans la scène, avec différentes étapes et changements de rythme, donne un parcours toujours en mouvement. L’histoire du village ainsi racontée est une interprétation voulue, un éclairage particulier.

Chaque point, comme un chapitre, intègre, outre les extraits de correspondance, des éléments d’histoire et des éléments sur la nature environnante, plongeant dans l’histoire du village, depuis ses origines médiévales (1206) jusqu’à aujourd’hui.

Enfin les musiques et la voix accompagnent pas à pas le visiteur, dans le dédale tumultueux et les contrées plus sauvages, pour que celui-ci participe aussi à l’histoire.